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rock - Page 19

  • Eagles of Death Metal, rock'n'roll et attitude

    Les Eagles of Death Metal ont fini leur concert parisien. La chose a été plus que médiatisée. L'Olympia est devenu hier soir plus qu'un lieu hype. Les psychologues se sont exprimés, on a vu fleurir dans des médias improbables des considérations sur la setlist du groupe. Quelques avis ont tranché ça et là, revenant sur les déclarations tonitruantes de Jesse Hughes à propos des flingues... Bref, comme d'habitude, il y a eu du sérieux, du moins sérieux et du n'importe quoi. J'adore le n'importe quoi. Surtout quand il s'agit de rock'n'roll. 

    In antiquis temporibus, le rock était chose maudite, le truc qui faisait peur aux parents, aux bourgeois, aux institutions. Et ceci était bon. Celui qui en écoutait le faisait d'abord par plaisir, et pour le plaisir de faire chier son prochain. Plaisir secondaire, mais néanmoins procurant une forme de jouissance. Don't criticize what you don't understand. Dylan avait raison. Vos mômes ne sont plus sous votre contrôle. Eclats de rire narquois des mômes. Les sales gosses ont gagné. Il y eût Tipper Gore dans les années 80, l'épouse de Al "une vérité qui dérange" Gore, en croisade contre les affreux métalleux sataniques. Je revois ces images de Frank Zappa en costard allant défendre la cause devant le Sénat américain... Jouissance. Le rock conservait sa dimension consubstantiellement hédonique. Le son à fond, hey ho, let's go. 

    Les mômes ont eu des mômes. Il y a eu passage, transmission générationnelle. On allait au concert en famille. On se réjouissait de voir ses enfants puiser dans la discothèque familiale pour remplir leur iPod de pépites issues du répertoire des Who, des Stranglers. Il y eut même ce glorieux moment personnel où l'une de mes filles de demanda de baisser le son alors que j'écoutais Suicidal Tendencies à un volume sonore forçant le respect, dans le but probablement inconscient d'emmerder mes voisins, comme je l'avais pratiqué pendant ma sage adolescence... Ecouter du rock avait quoi qu'il en soit, perdu son potentiel de nuisance. C'était devenu une affaire de goût personnel. De sale goût. Mais quelque part quelque chose de mainstream. PhilMan était juré de la Nouvelle Star, Ungemuth pigiste au Figaro...

    Mais revenons aux Eagles of Death Metal. Pas un groupe majeur jusqu'au 13 novembre. Un groupe qui entre dans l'Histoire de manière follement, tragiquement, atrocement contingente. Un groupe comme il y en a des dizaines aux Etats-Unis. Un groupe que j'avais vu à Rock en Seine en 2009, parce que porté par la complicité entre Jesse Hughes et Josh Homme. Cette année-là, j'avais laissé glisser le concert puissant et sympathique des EODM, et avais franchement joui quelques minutes plus tard en écoutant Them Crooked Vultures, Josh Homme, Dave Grohl, John Paul Jones. Comme j'étais en transe lors du concert des Queens of the Stone Age l'année suivante. Josh Homme, toujours. Il n'était pas à Paris le 13 novembre. Qu'importe. Il fait partie de ces hyperactifs de la cause rock'n'rollienne, toujours sur la brèche, toujours sur un projet. Ne se reposant pas sur les ventes colossales d'un seul album et faisant des breaks interminables le temps d'assurer le service après-vente. Il crée. Comme Ty Segall, mais aussi comme les grands des 70s. Comme Bowie, capable de sortir coup sur coup, sans plan marketing particulier un album majeur par an. Comme Picasso, créatif, touche à tout. Multi-instrumentiste, expérimentateur, apprenti-sorcier. D'EODM, j'avais retenu l'attitude toute en déconne de Jesse Hughes, parodiant les postures des stars du rock. Un côté volontairement Spinal Tap. Et une musique puissante. Pas follement originale, mais finalement conforme aux standards de base du rock, jouer fort, se donner à fond pour son public, suer, déconner, faire le show. 

    Aujourd'hui, EODM est entré dans la légende. Par la case attentat. Il y a eu des concerts tragiques, des morts dans des festivals. Mais jamais de tuerie de masse. On peut comprendre l'émotion, le trauma du type qui est sur scène dans une posture hédoniste, qui se prend la tragédie dans la gueule, qui voit son monde d'entertainment et de déconne inoffensive s'effondrer devant lui. Ce n'est pas rien. Qu'aurions-nous fait à sa place, hein? On se serait chiés dessus, on aurait flippé, on aurait pas joué les Rambo. Je suis prêt à le parier. Et ouais, Tuco, dans la vie, il y a deux type d'individus, ceux qui ont des Kalach et ceux qui creusent. Hélas. EODM est un groupe mineur et tragique. Fin de l'histoire. Un groupe de rock'n'roll, sans prétention particulière autre que le fun, le gros son. L'une des multiples facettes du rock, entre Bono (je vais à Davos causer avec les grands de ce monde de la planète qui va mal), et Chris Martin (je suis tellement transparent que je ne dis rien et le rock c'est un job comme un autre)... 

    Finalement, il est réjouissant que d'aucuns s'offusquent encore de déclarations à l'emporte-pièce sur Dieu, Donald Trump et les flingues. Il est réjouissant que certains s'étranglent à propos des gestes obscènes de Phil Anselmo. Dans un monde où tout est lissé, calculé, où chaque parole est pesée, marketée, calibrée. C'est la légende du rock. C'est son essence, faite de sueur et de foutre. D'attitude. Ted Nugent est un vieux con, chasseur et fan de la NRA. N'empêche que même plus de 30 ans après sa sortie, Cat Scratch Fever est un monument. Jerry Lee Lewis est un vieux con méchant. Whole Lotta Shakin Goin' On, une des pierres angulaires du rock. Iggy, même assagi, restera toujours le vieil oncle sale qui montre sa bite et raconte des histoires salaces devant les enfants le soir de Noël. La liste est longue. 

    Le rock doit conserver son potentiel de nuisance. Continuer à faire un petit peu peur. Ne pas être un exemple pour la jeunesse. Ni pour la vieillesse d'ailleurs. Et faire chier. Agacer. Enerver. Choquer. Etre excessif. Bordélique. Faire saigner les esgourdes. Etre mal élevé, doigts dans le nez, majeur levé, mal coiffé. Pour nous rappeler qu'on est vivants. Et pas juste de braves petits soldats qui font où on leur dit de faire, dans un monde aseptisé fait de limiteurs de bruits, de législation anti-tout, de religieux hyper-sensibles de tous poils et plumes, de politiques prêts à tout pour plaire, de divertissement de masse et esprit festif obligatoire. 

    Hey Hey My My Rock'n'roll Will Never Die

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  • Ce que nous rapelle Bowie

    Saleté de Twitter dont la timeline commence à ressembler à une rubrique nécro permanente avec pleurs, grincements de dents et compassion obligatoire pour les chers disparus... Saletés de médias dont la teneur éditoriale commence à ressembler à une nécro permanente, etc... Saleté de gens qui se sentent obligés d'y aller de leur larmichette et de s'émouvoir dès qu'une célébrité est arrachée à l'affection des siens... Bref, pleurs et cris. Mine de rien, il y a un petit côté Corée du Nord dans ces torrents de larmes trop massifs pour être vraiment honnêtes. Quelque chose de finalement ultra conformiste. Un mort, des larmes. Automatisme.

    Certains se sont émus de cette compassion permanente, laissant entendre que tout de même, France Inter (entre autres) n'aurait pas du accorder tant de temps d'antenne à l'évocation de la mort de David Bowie... Certes.

    Mais, et ce faisant je prêche pour ma paroisse, la disparition, la mort d'une icône comme Bowie m'a stupéfié. Le genre de nouvelle qui tombe de façon imprévue au petit matin. Alors que l'artiste vient de sortir un album, dont il faut reconnaître qu'il est, en toute objectivité, plus que décent, car finalement conforme à l'idée qu'un fan de rock puisse se faire des capacités créatives d'un artiste connu pour sa capacité à prendre son public à contrepied. Pour le béotien, pour le novice, pour celui qui se fout du rock ou de la pop, la mort de l'artiste glissera comme l'eau sur les plumes du canard (qui est toujours vivant, vieille blague issue des tréfonds des 60s). Quoi qu'il en soit, le constat est là, l'artiste n'est plus et, là aussi, il faut le reconnaître, il a réussi sa sortie. Album (Blackstar), clip (Lazarus), ultimes photos, pas de cérémonie. Pas d'images de déchéance. L'élégance jusqu'aux derniers instants, une maîtrise absolue de la communication et du timing. Parfait. 

    A ceux qui pensent qu'on en aurait trop fait, on peut opposer l'idée que Bowie représente une carrière de presque 50  années, avec des pics créatifs, des bas, et au final, consistance, densité et une véritable oeuvre, musicale et visuelle. A l'heure de l'éphémère, de la star jetable, on sent poindre dans les esprits une sorte de nostalgie d'un temps où une carrière artistique se construisait dans la durée. Il y a toujours eu des gloires éphémères, des "one hit wonder". Bowie aurait pu en être. Ses biographes racontent que Space Oddity aurait pu n'être qu'un passage fulgurant dans le paysage encombré de la pop anglaise des 60s. Mais l'artiste avait de la ressource. C'est peut-être ça qui a fait la différence, la vision, l'instinct, le génie... Créer, tenter, inventer, explorer, et avoir le sens inné de la communication. S'exposer, disparaître, revenir. Les réincarnations de Bowie sont multiples. A chaque étape, un nouveau public. Jusqu'à devenir culte. Et durer dans le temps. Chacun a son Bowie. Son expérience personnelle. Unique. Ceux qui sont plus Ziggy, ceux qui sont Thin White Duke, ceux qui ont adhéré à Bowie période Let's dance/Prédateurs/Furyo. C'est probablement ça que l'on va pleurer dans cette époque incertaine. Va-t-on pleurer les One Direction dans 50 ans? Une fois que le dernier membre vivant aura tiré sa révérence? J'ai comme un doute. Pleurerai-je Ty Segall? Kurt Vile? Thom Yorke? Pharrell? J'ai un doute aussi. D'abord, je pars d'un postulat absurde, celui d'être encore suffisamment lucide et pas encore assez liquide pour écouter encore du rock à l'âge canonique de 101 ans... La surdité aidant, je plains les voisins de cimetière... On verra.

    J'ai tout de même une conviction un peu étrange que les années qui viennent vont être celles où les baby boomers vont voir leurs héros d'adolescence et ceux qui ont fait la bande-son de leurs années de jeunesse éternelle, tirer leur révérence les uns après les autres. Ceux qui ne sont pas morts à 27 ans d'une OD vont tranquillement mourir du cancer, dans leur lit, normalement. Normalement. Même pas coincés dans leurs toilettes comme le King. Ils vont mourir vieux. Comme nous. C'en est flippant. D'autant plus que ces mêmes stars vieillissantes continuent de remplir les salles et les stades. En mode nostalgie. Comme si le monde du rock n'était finalement plus que le musée Grévin. 

    Alors que faire? Aller dans les petites salles, tenter de déceler les pépites, se faire plaisir, donner leur chance à des inconnus, se foutre de la pérennité, ne pas suivre la masse, écouter, sentir la vibe, et toujours mettre les curseurs sur 11... 

    Et chanter Ziggy Stardust, China Girl, Starman et Heroes sous la douche, ou au volant. 

    Jusqu'au prochain. 

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  • Lemmy

    Motörhead est aujourd'hui patrimonial. Et pour être franc, je suis venu à Motörhead un peu sur le tard. Ou j'y suis revenu. Ou j'ai été prisonnier de certains carcans mentaux de l'adolescence qui m'ont fait négliger le metal, à l'époque. Parce qu'on ne pouvait pas écouter du punk et du hard rock, Parce que ça n'était juste pas possible. Parce qu'on devait être Rock&Folk ou Best. Parce ce que YouTube n'existait pas. Parce que la musique n'était souvent que papier, au travers des récits de Garnier, Manoeuvre et compagnie. 

    Mais No Sleep Till Hammersmith, Ace of Spades, Saint Valentine's Day Massacre, l'EP avec les moches de Girlschool, sont tant d'images qui restent gravées dans des pans de mémoire d'adolescence.

    Quelques années plus tard, Napster, Kazaa, les bit torrents ont permis des sessions de rattrapage, intensives. YouTube a comblé les vides, mis des images sur les sons. 

    Le temps a passé. Les gloires éphémères se sont volatilisées. Les modes aussi. Nos rockers, ceux qui ont passé l'âge fatidique de 27 ans, se sont tranquillement embourgeoisés. Jusqu'à parfois l'absurde. Vacances, santé, plans de carrière, sécurité. On fait du rock comme un job ordinaire, quelques tatouages en plus. Les vieux rockers se produisent sur scène, sortent des albums. Remplissent les stades. On se demande parfois, s'il ne faudrait pas vendre un rein pour assister à ces shows parfaits aux effets spéciaux surgonflés, dans ces arènes où la moindre bouteille d'eau se voit délestée de son bouchon et où la législation anti-tabac expose tout un chacun aux effluves sui generis de son prochain. Bref, on s'emmerde au prix fort pour aller écouter U2, Coldplay ou Beyoncé. Voire Deep Purple.

    Une idée de rébellion qu'incarnait le rock est morte et enterrée. Même si le 13 novembre a tragiquement réveillé la flamme. Paradoxe, Motörhead devait jouer à Paris le 15, concert annulé. Mais Lemmy ne jouera plus à Paname. Cette fois-ci c'est définitif. Le crabe l'a eu. Foudroyé. Crac. En 3 jours à peine. Une mort presque normale. Pas de "longue et douloureuse maladie", un truc rapide, comme l'avion de Buddy Holly, le camion de Duane Allman. Pas de Mark Chapman, pas de coups de flingue. Killed by Death, comme il le chantait. La Mort a fini par l'avoir. Au bout de 70 ans. 

    Quand on réécoute Motörhead, à donf comme il se doit, il y a le bruit et la fureur, sans artifices. Guitare, basse, batterie, attitude. L'essence du rock'n'roll. L'alpha et l'omega. Le Yin et le Yang. Et le sentiment d'urgence permanente. 

    Les t-shirts Motörhead vont resurgir sur les torses siliconés de fashonistas. Tout comme hier elles portaient les couleurs des Ramones. 

    Pendant ce temps, on va ressortir la bière, on va boire du lourd, on mettra le son sur 11. Et on braillera Ace of Spades d'une voix éraillée. 

    Et ça sera juste et bon. Et on fera cela en mémoire de lui. 

    A la tienne, Lemmy.

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  • Merci pour ces moments

    Comme promis dans le post précédent, en vrac sans hiérarchie, de mémoire (enfin presque)... mes beaux moments de 2015: 

    Interstellar, revu deux fois de suite. Emotion, prise de tête, beau.

    Fauve, nouvel album, Olympia, Rcok en Sein et clap de fin au Bataclan.

    Fuzz, grosse baffe dans la tronche, Route du Rock et Rock en Seine, du gros rock, du gros son, et cadeau de Noël.

    Savages, Route du Rock, en noir et blanc, ferveur chamanique, sensualité envoutante.

    Star Wars VII, retour aux sources, retour à l'esprit des origines de l'épisode IV, j'ai à nouveau 14 ans.

    Aarto Paasilinna et son humour ravageur, belles heures de lecture, Le Fils du Dieu de l'Orage, entre autres.

    Mad Max Fury Road, grosse claque visuelle, reboot complet de la saga. Bruit et fureur.

    Je suis Pilgrim, le thriller qui tue, 900 pages trépidantes.

    Shaun le mouton, Wallace et Gromit, l'univers magique du Studio Aardman aux Arts Ludiques.

    Father John Misty, crooner morrisonien, Route du Rock, l'attitude, les mélodies, le charisme.

    Pete et Carl, bordéliques et imparfaits, Rock en Seine.

    Le retour du Chat du Rabbin, et la magie intacte de Joann Sfar,

    Millenium 4, malgré la hype, malgré le sacrilège commis en l'absence de Sieg Larsson retenu dans l'au-delà.

    Springsteen, The ties that bind, The River, I come from down in the valley... Le Boss, encore et toujours.

    Le retour des Cowboys Fringants, plus en forme que jamais, Octobre.

    Republik, le retour de Frank Darcel, Rock in Rennes.

    Daho à Rock en Seine et des classiques revisités avec fièvre.

    FFS, Franz Ferdinand, Sparks, magie autant sur scène que sur album.

    Jeanne Added, interprétant Bowie dans le spectacle de Decouflé, ou les titres de son propre premier album.

    Comme un avion, le cinéma simple et frais de Bruno Podalydès.

    Homeland, saison 5.

    Game of Thrones, saison 5.

    Sicario, Good Kill, des flingues, des narcos, des drones, des jihadistes. Du ciné glaçant et efficace. 

    Les Fauvettes, y revoir Blade Runner et Alien sur grand écran.

    Les Tontons Flingueurs en salle sur grand éccran, moment culte.

    Flavia Coelho, live à Rabat. Magique.

    Traverser Paris en roller, quand il n'y a encore personne dans les rues.

    Entendre El Mariachi dans un rade mexicain au fin fond du Morelos.

    Ecouter de la salsa à Santa Cruz de la Sierra.

    Le retour de la vengeance du blog de Yoda, version papier. Joie.

    Le Dictionnaire du Rock de Michka Assayas, deuxième édition.

    ...

    J'en oublie. Probablement. La mémoire est traitresse. 

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