Lonely Walk, post-punk abrasif bordelais. Elevé en fût de chêne, un peu brutal au premier abord, mais bonne longueur en bouche. Un son qui aurait pu naître dans les années 80 du côté de Manchester, et qui pourtant dégage une puissante modernité. Le Bordelais fut terre angloise ne l'oublions pas. Il y a sûrement des restes ancrés profondément dans l'ADN local. L'album de Lonely Walk est sorti le 24 janvier dernier. J'ai - mea culpa, mea maxima culpa - un peu trainé dans la rédaction de mes chroniques. Et ce matin, alors que je prépare la mise en ligne de l'interview express des 2/5 de Lonely Walk, à savoir Nicolas (guitare) et Baptiste (synthé), je m'envoie dans les esgourdes les 10 titres de ce troisième album du groupe. Très abouti. Enfin, la formulation exacte du rock critic flemmard avec tous les clichés qui vont bien, serait : "le combo bordelais sort son 3ème album éponyme, un opus sans concession". Bref, comment décrire cet album sans se lancer dans une exégèse pompière avec références à Magazine, Bauhaus, Protomartyr, Editors, et tutti quanti? Le goût musical est quelque chose de très personnel.
En attendant, interview express truffée de révélations, où l'on parle de Michel Sardou, de Radiohead, de bite, d'Ennio Morricone et de Kim McGuire.
Crédit photo : ©️ Rémi Labarthe
1. Si tu ne devais ne garder qu’un seul album de toute ta discothèque ?
Nicolas [Guitare] : Radiohead - « Kid A ».
Baptiste [Synthétiseur/Chœurs] : Bien entendu, impossible de répondre à cette question. Ce serait forcément un choix qui se ferait en dépit de très nombreux autres albums dont je ne peux pas me passer non plus. Le premier qui me vient à l’esprit est le premier album de Pacific ! intitulé « Rêveries ». C’est la musique d’un groupe suédois qui a beaucoup écouté Supertramp, Air, de la library music, Daft Punk, et qui a su digérer tout cela pour en faire un album impeccable, une pop électronique qui fantasme des grands espaces, des gens éternellement beaux et jeunes dans de belles voitures. Demain ce sera un autre album.
2. Si tu ne devais garder qu’une seule chanson ?
Nicolas : Radiohead - « Everything In Its Right Place ». Lien :
Baptiste : Encore une fois, extrêmement compliqué de répondre à cette question-là. Je pense que je prendrais ces plantes sonores que J.G. Ballard décrit dans Vermilion Sands, qui « chantent » de la musique. Je les croiserai avec une sorte d’intelligence artificielle qui compose automatiquement selon les morceaux qu’on lui met dans sa base d’apprentissage. Dans sa base d’apprentissage, je mettrai probablement le morceau « The Garden and All In the Golden Afternoon » chantée par les fleurs du dessin animé « Alice au Pays des Merveilles ». Je pourrai ensuite enregistrer la composition autogénérée par ma plante sonore et réinjecter la chanson créée dans la base d’apprentissage. Les résultats donnés seront toujours différents et surprenants. Cela me permettra de glisser doucement vers la folie.
3. Le truc le plus inavouable caché dans ton iPod (iPad, collection de CDs, K7, vinyles, favoris de ta plateforme de streaming, etc.) ?
Nicolas : Journey - « Don’t Stop Believin’ ».
Baptiste : C’est dommage d’avoir peur de dire ce que l’on aime bien par peur du jugement, surtout lorsqu’on parle de musique : il n’y a pourtant aucun « parcours parfait » possible, on est toujours de mauvais goût pour quelqu’un d’autre. Aucun souci pour avouer mon intérêt pour la pop-rock féminine des années 90-2000 : Nathalie Imbruglia avec « Torn », Jennifer Paige avec « Crush », Texas et « Say What You Want », « Les Poèmes de Michelle » de Teri Moïse par exemple. De même que « You Get What you Give » des New Radicals, tiens.
4. Le truc le plus triste - celui qui te plonge dans un abîme insondable de tristesse ?
Nicolas : R.E.M. – « Electrolite ».
Baptiste : Les personnes disant « J’écoute de tout » dans un covoiturage. C’est généralement faux et on se retrouve à écouter Vianney... Ennio Morricone - « Macchie Solari ».
5. Le truc le plus joyeux - qui te donne la patate et que tu écoutes systématiquement pour te rebooster ?
Nicolas : Luciana – « I’m Still Hot ».
Baptiste : Beach Boys – « Feel Flows » composé par Carl Wilson, l’autre frère Wilson qui en avait aussi sous le capot.
6. Le morceau que tu ne peux plus écouter ?
Nicolas : Michel Sardou - « Les Lacs du Connemara ».
Baptiste : Les sons des boîtiers anti-jeunes.
7. Le morceau ou l’artiste que tu zappes systématiquement ?
Nicolas : Michel Sardou - « Les Lacs du Connemara ».
Baptiste : Tout Radiohead. Pas de morceau potable, trop d’emphase, la madeleine de Proust des quadras : hop, poubelle.
8. Idole absolue - s’il n’en reste qu’un ?
Nicolas : Billy.
Baptiste : Eyvind Earle, Rube Goldberg, Ennio Morricone, Le dessinateur Fred, Piero Umiliani, il y en a beaucoup… Dans la limite définie par la Miviludes néanmoins.
9. Kim Jong-un ou Kim Kardashian (ou Kim Wilde, Kim Basinger, Kim Deal, Kim Dotcom, Kim Fowley, etc.) ?
Nicolas : Kim Basinger.
Baptiste : Kim McGuire qui a répondu à un casting stipulant : « On recherche : fille avec un beau corps mais un visage alarmant, mais qui en est fière », pour le film « Cry Baby » de John Waters.
10. Ton objet-culte, ton doudou ?
Nicolas : Ma bite.
Baptiste : On devinera aisément que mon objet-culte n’est pas le même que celui de Nicolas. Probablement un poster de la famille Duck, illustré par Keno Don Rosa.
11. Drogue préférée ?
Nicolas : L’ostéopathie.
Baptiste : Le café, mais je confesse une curiosité pour les cabines de flottaison et de privation sensorielle. Cette interview devient passionnante pour le lecteur, non ?
12. Alcool préféré ?
Nicolas : Le Jägermeister.
Baptiste : La bière, la moins chère possible. Les IPA, les bières locavores pour les développeurs à la barbe bien taillée ou les bières d’abbaye pour les bars à jeux, ça m’angoisse.
13. Tes premiers mots en tant que Miss France ?
Nicolas : « Il est beau mon cul, bande de pervers ! ».
Baptiste : « Vous n’êtes pas mal non plus. »
14. Fuir mais où ?
Nicolas : Dans la forêt landaise.
Baptiste : L’affaire Louis Trio – « Cabane en Rondins ».
15. Si tu ne devais faire qu’une seule émission de télé ou de radio ?
Nicolas : Pyramide.
Baptiste : « Importantissime », de Chris Esquerre. Dans son spectacle « Muté », le moment où il fait dégorger le public de ses rires, c’est une trouvaille assez dingue. Ou alors l’émission « Slam », présentée par Cyril Féraud. Avec sa tête de gendre idéal, Il a une capacité à sortir les blagues les plus vulgaires du monde devant des petits vieux assez hallucinante.
16. Film culte de chez culte ?
Nicolas : Eternal Sunshine of the Spotless Mind.
Baptiste : pas trop de film culte, je ne les regarde qu’une seule fois en général, puis je reste sur mes souvenirs. Récemment j’ai vu « Dupont-Lajoie » d’Yves Boisset, avec de grands seconds couteaux du cinéma français : Jean Carmet, Victor Lanoux, Jean-Pierre Marielle… Je ne connaissais rien de ce film et pensais tomber sur une comédie franchouillarde à la Joël Séria. Ça commence en effet comme du Joël Séria : un débitant de boisson parisien un peu poujadiste, macho, raciste sur les bords qui part en vacances dans le Sud, puis ça devient extrêmement étouffant. Ça me semble être un grand témoignage de la France post-guerre d’Algérie, et les thèmes sont plus que jamais d’actualité.
17. Livre culte de chez culte ?
Nicolas : « Le pouvoir bénéfique des mains » de Barbara Ann Brennan.
Baptiste : La série « Philémon » du dessinateur Fred. Comme si Boby Lapointe et Georges Brassens racontaient Alice au Pays des Merveilles à leurs enfants avec un coup dans le nez, à coups d’associations d’idées. A mettre entre toutes les mains, comme disent les libraires.
18. Marc Lévy ou Guillaume Musso ?
Nicolas : Jamais lu.
Baptiste : Comme ce sont des bouquins pour lire à la plage, une solution alternative : des mots fléchés.
19. La fin justifiant les moyens, jusqu'où es-tu prêt(e) à aller pour faire partie des 50 personnalités préférées des français ?
Nicolas : Me présenter à la présidentielle en gilet jaune.
Baptiste : faire une tournée de sensibilisation au bilan carbone dans un jet privé avec une fausse cheminée, comme l’avion de Led Zeppelin. C’est important d’être paradoxal pour ce type de sondage, pour alimenter les débats enflammés durant les repas de famille.
20. Un dernier mot ?
Nicolas : Merci.
Baptiste : Un mot à ne plus utiliser : « Malaisant ».
Lonely Walk - "Lonely Walk" (Labels : Permafrost, Kerviniou et I Love Limoges) dans les bacs et sur les plateformes de streaming.