Quand on parle de la Route du Rock, on pense d'abord pluie. Ca sonne un peu cliché, certes. Mais Bretagne, mois d'août, tout ça... ça fleure bon les bottes Aigle bleu marine et blanches et le ciré jaune. Là, le chroniqueur est un peu de mauvaise foi. Enfin, pas tant que ça. Car il sait. Il a donné, il a vécu l'édition précédente. Gros son et pluie battante. Cette année il est prêt. Même à écouter Björk. Motivé!
Puis Björk annule. Pas une si mauvaise nouvelle finalement. Parce que qui écoute Björk, hein? A cet instant je me rappelle que j'ai vu les Sugarcubes au siècle dernier. On ne va pas y passer des heures non plus. De toutes façons, la Route du Rock c'est de la découverte, non?
Jour 1 - Vendredi 14 - Il pleut. Tenue de pluie et bottes: check. Couverture de survie: check. Canot pneumatique: check. Pelle, treuil pour désembourber le véhicule à la sortie du parking: check. J'en rajoute un peu pour la dramaturgie. Le plafond est bas. Un coup à chanter du Jean-Michel Caradec... J'aime ma Bretagne quand elle pleut...
Arrivée sur zone. Le champ, boueux. Le chemin, boueux. Glastonbury c'est pareil d'après les connaisseurs. A Woodstock il avait plu. Rien à redire. Dans l'enceinte du Fort Saint Père, chamboulement, il y a une zone couverte avec tables et bancs. Devant la scène du Fort, sol caillouteux. Pas une goutte d'eau, pas une flaque. Devant la scène des Remparts, un joli carré d'herbe dont on se demande ce qu'il en adviendra une fois piétiné par la foule... Mais bon...
Wand ouvre le feu. Guitares saturées, c'est mélodique, punk, sympa. On réécoutera ensuite. L'impression est favorable.
Translation versa la grande scène pour le show de Thurston Moore. Minimaliste, appliqué, puissant. Il se bat avec son pupitre. Envoie du gros son. Sans trop de délires bruitistes façon Sonic Youth. Cela dit, je ne suis pas un incoditionnel de son ancien groupe. Chakras ouvert, j'écoute. Je déguste.
Pause cidre.
Fuzz... Non look absolu, maquillages blancs... Je débarque, pas lu le programme avant ou trop rapidement, j'avais zappé que le trio comptait Ty Segall à la batterie. Qui boit son vin au goulot. Gros gros, très gros son, façon Black Sabbath. La température monte. Le festivalier sèche sur place. Les oreilles saignent. C'est le premier grand moment de cette Route du Rock.
Algiers... Belle voix de gospel... A part ça... Le bassiste-clavier s'agite à la façon d'un Bez des Happy Mondays. Je décroche.
Pause merguez-frite.
Timber Timbre... Partant du principe que les goûts et les couleurs... bref, je me balance d'un pied sur l'autre en attendant que le show se termine. Je file écouter Girl Band. Le chanteur nous la joue Kurt Cobain. Le son est abrasif. Je décroche, sur le constat très personnel que ça manque un peu de mélodies...
Ratatat débarque. Postures de guitar heroes, univers très pop. Un show plein de jolies vidéos qui te mets de bonne humeur. Instantanément.
Retour dans les champs...
Samedi 15 - Jour 2 - Pas de pluie. La joie étreint le festivalier. Qui en écouterait presque un album de Björk pour conjurer le mauvais sort et mettre Thor et Odin de son côté. Arrivée sur zone à la cool. Il y a la foule des grands soirs. Comme un samedi. Arrivée trop tardive et loupage du show d'Only Real. Je sors mon appareil photo. Prends un ou deux clichés de Kiasmos, histoire de tester lumière, vitesse, ouverture et tout et tout... Trois baraqués de la sécurité se pointent. Vérification des bracelets... Gargl... le blogueur n'a pas l'accréd pour se balader sur le site avec un appareil photo manifestement considéré comme du matos professionnel... Il est raccompagné à la consigne pour y déposer ses petites affaires. Ils s'y mettent à trois. Etant d'une humeur de rêve et ne maîtrisant pas le krav maga, et partant du principe d'Audiard que quand 3 types de 120 kilos lui parlent, le blogueur de 100 kilos écoute, je remets à regrets mon Nikon aux autorités... Parait qu'il y en a qui font du commerce de photos de concert. Bigre. [Note pour moi-même: penser à trouver un moyen d'avoir une accréd pour l'édition 2016].
Cidre. Sur fond de Kiasmos. Rien à dire sinon que DJ c'est un job de flemmard. Pas de spectacle. Un ou deux bras levés en l'air, un peu comme David G. Des boucles et de grosses basses. Belles nappes électroniques. Rien de fracassant sinon le fait que l'un des membres du duo vient des Îles Feroé et l'autre d'Islande. Exotique...
On glisse tranquillement vers la scène des Remparts où se produisent Hinds. Quatre filles, espagnoles, c'est frais, c'est pop, c'est speed, c'est sympa... Lo-Fi et garage, soit en clair un peu amateur et peu produit. Avec l'avantage de la spontanéité. Le moment est agréable, le charisme fait le reste.
Changement d'atmosphère avec The Soft Moon qui balance la seconde grosse claque du festival. Noir, très noir. Envoutant et martial. Electrique et électronique, brut.
Pause merguez pendant Spectres. No comment.
La nuit est tombée. Et là, Björk débarque. Ce n'était qu'une mauvaise blague. Stop, on arrête de rire. Sortez les katanas... Fin de la mauvaise vanne. Foals débarque sur scène. Le bassiste est malade, mais remplacé par le backliner. Et Foals envoie le bois. Et c'est bien, ça groove, c'est sympa. Ils mouillent le maillot, ils ne sont pas que les remplaçants d'une diva fantasque. Ils sont un vrai groupe pro qui vient faire le show. Un show presque trop court. Mais plein de bonne humeur. Qui te laisse rentrer chez toi avec la banane. Content.
Récupération de l'appareil photo. Retour au champ. Et même pas de contrôle de police à la sortie du parking.
Dimanche 16 - Jour 3 - Pas de blague. On ne rigole pas aujourd'hui. L'affiche est dense. A commencer par The Districts. Bon début de soirée avec une plongée en pleine americana. The Districts, c'est l'énergie, c'est une présence scénique forte, à l'ancienne. Ca bouge. Guitares, basse, batterie, avec même un zeste d'harmonica springsteenien. Parfaite introduction pour se préparer pour le set de Father John Misty.
Josh Tillman débarque sur scène, costard noir, lunettes noires, tête de Jim Morrison, attitude. On se voit déjà sur la côte Ouest du côté de Laurel Canyon. C'est pop, c'est mélodique. C'est beau. Guitares acoustiques, slide, clavier. La voix est belle. On en redemande. Dans la droite lignée des magnifiques Fleet Foxes. Un des très grands moments de l'édition 2015.
Changement d'ambiance avec Viet Cong, intéressant mais inégal.
Pause cidre et nourritures terrestres.
La nuit est tombée.
Et Savages lance le show. Et là on est scotché. C'est dense, c'est speed, c'est brutal et sensuel. Jehnn donne tout, façon Siouxsie ou Patti Smith. Très gros son, plein d'énergie. Même sur talons aiguilles. On en redemande, on en veut encore. Et ça finit par s'arrêter. Et les mots me manquent. Et le rock est définitivement féminin.
Et Ride s'installe et envoie du très gros son. Et là, je fais un aveu. Je suis passé à côté de ce groupe à l'époque. Constat: même 20 ans plus tard, un coup de shoegaze ne peut pas nuire. C'est diablement efficace. Moins sensuel que Savages. Certes. Mais idéal pour finir une journée de festival. On zappe le reste. Retour bercail.
Quelques jours plus tard, lecture des compte-rendus, Libé, Les Inrocks, Télérama... On n'a pas du assister au même festoche... Je ris en mon fort intérieur. Ils ont aimé ce que je n'ai pas aimé. Je dois avoir un sale goût mainstream...
Pour les photos, quelques instagram sur MrDubuc.com
Commentaires
Tu as vraiment de la chance de pouvoir assister à tous ces concerts. J’irai voir les Deftones en concert le 14 novembre au Bataclan. Le billet n’était pas vraiment donné, mais je ne voulais aucunement rater cet évènement :).